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le vampire.

Le soir où vous descendîtes dans la rue, il n’y avait qu’une main qui pût vous être fatale, et c’est la mienne !… Mais je vous effraye !… Oh ! ne m’écoutez pas, je suis fou !… Et vous me parlez de votre père !… Ah ! Ophélia, bien que j’ignore votre vie et quelles qu’aient été vos actions, il pardonnera à sa fille, mais à moi, jamais !…

La jeune femme, devant l’émotion de Robert, sentit son cœur retomber dans le doute. Elle quittait un homme qui l’avait affreusement trompée en jouant l’affection. Celui-ci n’était-il pas un autre bourreau qui, par l’amour, allait lui torturer le cœur. Était-il dans sa destinée d’épuiser toutes les douleurs humaines, toutes les angoisses. Le jeune homme s’aperçut de cette vacillation, aussi reprit-il d’une voix calme :

— Oui, ma belle amie, je suis cruel de vous attrister de la sorte. Mais je suis ainsi fait ; tout d’abord je m’effraie. Certainement, je le vois, par le passé et par le présent, notre rencontre et mon amour, il est dans notre destinée de vivre ou de mourir ensemble. Un drame immense nous enveloppe. Depuis longtemps vous êtes condamnée ; quant à moi, le jour où je vous vis, mon cœur m’a perdu. Pour marcher sûrement dans cette voie qui tremble, il faut nous connaître.

— Je suis prête à tout dire.

— Et moi je vous apprendrai tout ; car deux êtres qui s’aiment ne font qu’un, et vous dire un secret n’est pas le divulguer.

— Hélas ! quand vous m’aurez entendue, vous m’aimerez toujours et me plaindrez, car je suis innocente.

— Et si je vous dis ma vie, moi, m’aimerez-vous encore ?