Page:Sorr - Le vampire, 1852.djvu/284

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
280
le vampire.

toujours. La voix du rêve m’assurait de son retour… Il est revenu… voici ses fleurs, voici son nom… Tous les soirs, je le revois, mais, j’ai peur !… Il me parait plus beau que lorsqu’il venait à moi sous les plis d’un fantôme. Antarès, ne croit pas aux fantômes. Quand je lui parle d’une de nos croyances d’Écosse, il rit d’un rire qui fait mal. Oui, c’est bien lui, il me le dit ici dans ces deux lignes. Il rêvait d’un ange !… moi aussi… Oh ! merci, mon Dieu, merci, du secours et du bonheur que vous m’envoyez !…

Ophélia se leva et fit un pas vers la croisée. Discrètement son doigt écarta un coin du rideau, demandant seulement la place de son œil. Mais, elle se retira aussitôt toute pâlie. La pauvre enfant, pâlissait aux émotions qui font rougir !…

Qu’avait-elle aperçu ?… Le savait-elle à peine !… Au même instant que son regard se hasardait, à la croisée d’en face, dans un coin du rideau, un œil s’aventurait aussi. Les deux rayons s’étaient rencontrés. Mais, tout à coup, un vertige lui passa devant les yeux, les objets parurent se mouvoir, elle tomba sur un siège. Elle but. Ces symptômes de faiblesse furent attribués à une émotion du cœur. La malheureuse enfant avait oublié la faim, mais la faim ne l’avait pas oublié !…

Elle retomba dans la vie tangible. Des oscitations nerveuses la saisirent, des crampes atroces torturaient sa poitrine, où un feu continuel entretenait une soif factice. Ces douleurs l’effrayèrent. Elle frissonna sous l’action du vertige. Il lui sembla qu’elle allait défaillir sur le carreau nu ; et, la pensée qu’elle giserait là sans secours, ralant de faim, lui donna une résolution désespérée.