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le vampire.

— Aujourd’hui que tant de misères pèsent sur cette ville, vous, étranger, que pouvez-vous espérer.

— Oh ! n’essaie pas d’ébranler la force morale qui me soutient !… Chère Ophélia, tu ne saurais croire l’affection que je te porte !… Ainsi, il est des heures terribles, où, seul, je me tuerais, mais, pour toi, je résiste. Oui, c’est lorsque le souvenir du passé vient heurter mon cerveau !…

— Ne parlons plus, bon Antarès, de ces heures éteintes.

— Selle enfant, reprit-il en appuyant la blonde tête sur lui, tu me les pardonnes, je le sais, mais, ma mémoire ne les efface pas ainsi !… Ensuite, je ne te connaissais pas ; j’ignorais la suavité de ton cœur, la blancheur de ton ame, le jour, où j’écoutai la proposition funeste qui t’a jetée dans ma vie. Mais, bientôt j’eus une révélation. Quand on me dit d’éteindre ton existence, je foisonnai à la pensée de ce crime, et j’en vins à aimer la victime que j’avais voulu perdre. Tu me pardonneras un jour, n’est-ce pas, Ophélia, les violences commises lorsque je te poussai dans un monde de vice et d’infamie. Je ne te considérais alors que comme une jeune fille ordinaire, que le plaisir devait conquérir aussitôt… on t’avait calomniée, et puis… on m’avait payé. Ah ! n’importe, je fus infâme, Ophélia, et tu ne me pardonneras que lorsque je t’aurai sauvée… car, je te sauverai !… Oh ! pour te donner du pain, je redeviendrai méchant, s’il le faut !…

— Oh ! ne parlez pas ainsi, Antarès !

— Qu’as-tu mangé, ce matin ? — Demanda-t-il avec un regard triste.

— Je vous attendais. — Et vous ?…