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le vampire.

À mesure qu’ils montaient, le jeune homme entendait derrière lui des portes s’entr’ouvrir discrètement et des ombres curieuses s’aventurer sur les paliers. Sans doute, il était étonnant de voir quelqu’un, un étranger demander sérieusement un appartement. Paris seul vous montre des lieux de ce genre. Des hôtels où l’on ne loue pas, des cafés où l’on ne consomme pas, des magasins où l’on ne vend pas. Quel est le nouvel esprit boiteux qui nous dira ce qu’on y fait ?…

Enfin, on introduisit le jeune homme dans une pièce exactement semblable à toutes les chambres garnies. Le prix ne fut pas discuté. Demeuré seul, Robert s’avança discrètement vers la croisée protégée de rideaux poussiéreux et parsemée de malhonnêtetés de mouches. En face s’accoudait la jeune femme.

Le cœur de notre amoureux s’ébattait à tout rompre. Chez l’homme le cœur est comme le pendule dans une horloge, seulement il est moins réglé. C’était bien la belle figure entrevue de loin, plus belle même encore, mais aussi plus triste, peut-être. Rien ne passait dans la rue ; ainsi un rêve l’occupait seul. Or, à quoi rêvent les jeunes femmes ?… Puis son regard indifférent s’arrêta sur la fenêtre toujours close de l’Hôtel de l’Aunis. Elle aperçut une tête et pâlit. Hélas ! aussitôt le pauvre Robert vit disparaître sa belle apparition. Il attendit une heure, mais la croisée ne se rouvrit plus, aucune ombre ne glissa sur le rideau. N’importe, il s’estimait heureux. Elle avait pâli et s’était retirée à sa vue. Cette dernière circonstance annonçait qu’il était connu, mais la première lui glissait bien un peu dans l’oreille qu’il était aimé. Robert arpentait donc la petite chambre tout joyeux. Son cœur rayon-