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le vampire.

— Cependant, ils ne se sont jamais aimés.

— C’est justement pour cela. On les voyait régulièrement tous les soirs au théâtre, dans leur loge, comme deux amoureux en bonne fortune. J’ai su tout le secret.

— Ah ! Et par qui ?

— Ma foi, par un des moines qui, le matin, chantait l’office dans son couvent, et le soir les chœurs dans Robert-le-Diable ; car c’était, à cette époque, l’opéra en vogue à Lisbonne. Lord Melrose entretenait la première danseuse, et mylady, — devinez.

— Vous allez me dire une calomnie méchante.

— Non, mais une médisance très gaie. La pâle et nébuleuse lady entretenait la basse-taille.

— C’est scandaleux !… Oh ! le sommeil m’accable !…

— Olivia, vous êtes adorable renversée ainsi sur ce coussin, votre physionomie se fait rêveuse, et mes rêves se font réalité auprès de vous !… Je vous aime ainsi, ma belle ange ; reposez encore !…

Horatio prépara une nouvelle tasse de thé avec un soin tout particulier. Olivia la but machinalement. Sa tête retomba sur le coussin, ses paupières s’affaissèrent, son souffle se fit régulier, elle dormit. Son mari la regardait sommeiller, et sa bouche exprimait un sourire vainqueur.

Il sonna. Miss Suky et miss Hannah apparurent.

— Couchez mylady, et, s’il se peut, ne la réveillez pas.

Les deux caméristes, aidées du lord lui-même, portèrent la jeune femme sur son lit, la déshabillèrent et la coiffèrent de nuit. Elle dormait toujours. Sa belle tête se perdit inerte dans les flots et les alvéoles des dentelles