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le vampire.

fleurs, furetait les arbres et se répandait brillantin sur la glabréité des feuilles.

Triste aspect que celui d’un lieu humide, sombre, frappé tout à coup de lumière ! La terre noire et verdâtre, les arbres effeuillés et rongés de mousses spongieuses, les pierres sales, nacrées des baves que laissent après eux les limaçons et les loches ; les salamandres jaunes et gluantes, regagnant éblouies leurs trous visqueux, tout cela jette à l’œil des nudités froides et malsaines ; on dirait un vieillard perdu dans sa décrépitude, malingre, farouche à toute joie, et qui sourit tout à coup à l’amour, grimace une velléité de caresse.

Cependant, au milieu de ce paysage rabougri et souffreteux solidement encadré dans quatre hautes murailles, marchait, d’un pas rêveur, un personnage dont la jeunesse et la suavité des formes contrastaient heureusement avec le fond et les détails. C’était une des femmes de Mylady Mackinguss. Sa tête, appuyée dans sa main, travaillait sans doute une pensée sérieuse, car elle ne prenait nullement garde au rayon de soleil qui jouait traîtreusement sur son blanc visage. Femme qui rêve, cœur qui aime.

Horatio la regardait fixement. Son œil habile sut aussitôt découvrir dans son allure un soupçon. Un soupçon, chez cet homme, était le prélude certain de la vérité. Il suivit un instant du regard cette jeune fille, et un léger rire sérieux vint bruire sur ses lèvres.

Mais le bourru nuage, grossier et mal poli, referma sa lucarne, et le soleil rentra dans le ciel. Aussitôt la jeune femme, effrayée de se trouver dans un si triste tableau, s’échappa à son tour.