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le vampire.

bon lot au dire de beaucoup de monde, et, même, ce qui vaut autant, de l’avis de son cœur. Il épousait une jeune fille aimée, appelée Valérie.

Valérie ne possédait seulement pas la pensée d’une dot, mais le ciel lui avait départi en place un visage à perdre bien des fortunes. C’était une de ces imposantes beautés mystiques et sérieuses que l’on n’ose aimer ; placides et froides dans l’indifférence, splendides d’effusion près d’une tête adorée. — À côté de cette belle femme, l’épousé discordait de formes. C’était un frêle jeune homme d’une nature peu forte, d’une physionomie douce mais faible. Valérie l’avait seul agréé. Elle l’aimait par cette même loi bizarre du cœur qui porte de beaux jeunes hommes, vigoureux de santé, brillants de fortune, à préférer aux belles femmes qui les entourent, une modeste enfant ignorée, insignifiante de tournure, médiocre d’esprit. Néanmoins, nos deux époux se convenaient fort bien l’un et l’autre ; et comme je n’ai que le droit de récit félicitons en monsieur et ne blâmons nullement madame.

Si vous voulez vous rappeler que ce fait a lieu en 1830 et de plus en province, vous me permetterez bien d’ajouter qu’on dansait un peu au mariage de M. Noirtier. Même, aujourd’hui, grand nombre de petites gens n’ont pas encore supprimé le bal des noces, cette joyeuse préface d’un roman bien vulgaire.

De crainte de me heurter contre une bizarrerie de goût, ou plutôt à une justesse de jugement, je n’avancerai pas que Valérie fût la plus jolie des femmes réunies pour le bal ; mais, assurément, c’était la plus belle. Parmi les hommes, on en distinguait aussi un plus beau.

Ce personnage, ami du marié, n’était pas français. Il