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le vampire.

femme se laisse prendre par un sentiment vainqueur. C’est pourquoi, certain jour, une nouvelle se répandit dans les salons de Londres : Miss Olivia de Firstland épousait lord Horatio Mackinguss.

Pour elle-même, pour son cœur, la fille du duc n’avait jamais vu que cet homme à ses pieds ; car cette héritière avait un genre de beauté trop sévère pour insinuer la rêverie dans une jeune tête en quête d’amour. Elle possédait la pureté de la ligne, le galbe heureux du contour, mais son œil n’était pas aimant, sa bouche ne dessinait aucun sourire venant du cœur. Sa beauté intimidait l’amour. Toutefois, cela ne l’empêchait point, même avec grande raison, d’avoir haute idée de son visage de marbre ; car, enfin, et je parle ici en général et digressivement, il n’est pas une femme qui, si horrible qu’elle soit, avoue franchement sa laideur. Il en est un grand nombre qui se reconnaissent hautement une beauté modeste ; mais il en est plus encore qui, en elles-mêmes, sont persuadées qu’elles possèdent le type de la véritable beauté, le modèle de la statuaire. Et, en effet, ces pauvres femmes, vivant par le sentiment de la vénusté, seraient trop désespérées s’il en était autrement. Que l’on rie après des illusions du poète !

Toutes les cérémonies de ce mariage de haute fashion eurent lieu à Londres. Je ne vous dirai pas les noms abruptes des notabilités de la cour et des sommités aristocratiques qui furent griffonnés au contrat. Nous passerons aussi sous silence les détails de toilette, l’expression heureuse séamment assise sur la physionomie de l’épousé et la teinte de contrainte et de tristesse dont devait être peint le visage du mari. Coups de pinceau carminés qu’il