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ment de sa colère ce sang froid et inerte. Comme les esprits faibles, tout interdits en face des agitations violentes qui secouent les autres, Horatio s’inclina avec embarras devant la portière qui se fermait devant lui.

Le vieux duc ne disait mot. Mais la pâleur de son visage révélait à l’intérieur une souffrance poignante. Son caractère équarri et façonné dans les mœurs fières et hautaines de la Calédonie, se tenait sombre en présence de son honneur frappé. Lui, qui dans la galerie de ses ancêtres possédait un portrait de Bruce, et par la ligne des femmes un Baliol, avoir été insulté en plein théâtre par un méchant petit laird des Basses-Terres, devenu marchand, homme de loi, que sais-je, et enrichi, comme tel !… Mais ses pensées silencieuses contrastaient avec l’irritation spasmodique d’Olivia ; elle ne parlait pas, mais ses lèvres mordues lançaient de fois à autre une articulation impatiente et colère. Les lignes de son front superbe se tordaient en plis profonds et crispés. Sa respiration sifflait dans les lobes dilatés de ses narines brûlantes, et l’on entendait ses dents cressir. Ses mains crevassaient ses gants et le pauvre bouquet se répandait en jonchée sur le tapis hachebaché de la voiture.

Seule, la vieille tante parlait, ruinant son cerveau farci de versets de la Bible, en hypothèses excentriques et suppositions impossibles, et retombant toujours dans son thème favori, touchant la scélératesse des hommes. Le duc embrassa sa fille et se retira dans ses appartements. Il exprima le désir d’être seul ; son valet de chambre sortit.

Le vieillard aimait Olivia. Mais l’affection qui les unis-