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le vampire.

Lodore. Il avança, et la tapisserie, cette fois, retomba derrière lui.

Amadeus, averti par le frôlement des tentures, se vit debout en face de lui. Effrayé, il repoussa son siège et recula. Robert, calme, marchait lentement vers lui, sans dire un mot. Amadeus porta la main à ses yeux comme pour chasser une hallucination, mais vainement. Son image avançait toujours. Il haletait. Ses joues livides se mouillaient de sueur, les veines de son front gonflaient bleuâtres, ses yeux se troublèrent. Une porte s’ouvrit derrière ses pas ; il la franchit en criant au secours d’une voix arrêtée et suffoquée, et, la tête perdue, il s’engagea dans les couloirs, les escaliers, et enfin, tomba sur la rue. Robert le suivait toujours.

Au dehors tout était désert, silencieux et sombre. L’effroi possédait si fortement sir Harriss, qu’il continuait sa course au hasard, dans des directions inconnues. Seulement, quand Robert, ou plutôt son ombre, l’atteignait davantage, il courait alors presque à reculons. Sa tète était nue. Lorsqu’il traversait quelque faible lueur, il apparaissait pâle et défait comme Hamlet devant le fantôme. Dans les ténèbres, quelques pas après Rolleboise, venait, suivant l’ombre des murailles, un troisième personnage qui, par moments, lui lançait une parole ou une phrase stimulante.

Les deux hommes, dans cette course fantastique, étaient si près l’un de l’autre, qu’Amadeus, les mains en avant, repoussait son fantôme.

— Qui êtes-vous ? articula faiblement le pauvre effrayé avec un martellement fébrile.

— Un vampire.