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le vampire.

le nom de ce sinistre spectateur placé seul, debout, sur le devant de cette loge sombre ?

Dans son empressement maladroit, le soupirant d’Olivia tira si vivement son binocle de sa poche, qu’il s’échappa de ses mains gourdes, tomba sur ses genoux, et alla rouler dans les jambes de la vieille tante, qui se mit aussitôt à glottorer de pudeur. Ces maladresses, commises en public, irritaient sourdement la fière jeune fille. Enfin, le pauvre lord, rouge d’intimidation, braqua sa jumelle sur l’individu immobile comme une statue.

— Certainement, je connais ce monsieur. C’est lord Lodore, mademoiselle.

— Le connaissez-vous intimement ?

— Non, mesdames ; mais si cependant cela devait vous plaire, je m’imposerais tellement à lui, qu’avant peu je saurais vous en parler savamment.

— Ah ! mylord, vous vous méprenez !… Je n’ai pas besoin de police.

Fatiguée par le regard fixe de Lodore, la jeune fille baissa les yeux sur ses fleurs que sa main, irritée par les inconvenances du comte, avait déjà maltraitées. En les considérant avec attention, elle découvrit un billet enroulé dans les corolles d’un camélia blanc. Le pauvre Horatio fut atteint de soupçon. En effet, sans s’émouvoir, la jeune fille se retourna et dit de sa voix la plus naturelle, mais un peu froidement :

— Mylord, il vous est loisible de me parler, mais je ne vous autorise pas à m’écrire. Retirez ce billet de mon bouquet, et faites la chose bienséamment, si cela vous est possible.

— Madame, fit Horatio en rougissant, ma foi !… un