Page:Sorr - Le vampire, 1852.djvu/124

Cette page a été validée par deux contributeurs.
120
le vampire.

jamais à donner des explications à quelqu’un qui n’a pas le droit d’en exiger, et, surtout, lorsque la cause en est ridicule. Après tout, il n’est pas adroit à vous de venir ainsi me montrer les fils de cette trame mélodramatique ; on vous invite à connaître la vérité ; allez-y.

— J’irai, répondit assez sèchement le jeune homme.

— Seulement, avant de vous aboucher ainsi avec des esprits nocturnes, réfléchissez sur les conséquences qui peuvent s’en suivre. Vous avez la tête faible, sir.

Miss Olivia se leva et vint proche de sa tante, toujours enveloppée comme un bouquet monstre dans les feuilles de son journal. La tête de la jeune fille était inclinée, son front pensif, et l’on voyait frémir ses lèvres sous une expression d’une sourde irritation nerveuse.

— Mais c’est épouvantable ! murmurait la vieille femme en s’enfonçant avec frénésie dans les plis bruyants du Times.

— Qu’est-il donc arrivé, ma tante ?

— Ma chère enfant, c’est inexplicable ! Depuis que les mœurs françaises viennent corrompre nos usages décents et religieux, on peut s’attendre à tout !…

— Une conspiration de chartistes ?

— Mais non, un fait immoral et sacrilège ! Les expressions ne sauraient expliquer décemment pareille monstruosité ! Enfin, voici trois nuits que dans le cimetière de Kensall-Green… ou plutôt High-Gate… non, non, c’est bien Kensall-Green. D’ailleurs, je l’ai ici. Tiens… allons… je ne le trouve plus maintenant… Ce journal est si grand !

Mais la jeune fille, abandonnant sa tante à son incertitude, transporta son attention vers la tenture de la porte qu’un domestique tenait soulevée pour donner passage.