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le vampire.

il se redressait contre cette infiltration épouvantable qu’injectaient en lui les soupçons d’Olivia. Mais bientôt le fluide fatal revenait le plonger dans ses angoisses poignantes.

Un jour, le vieillard passait lentement dans une salle lorsqu’il aperçut immobile, en face de lui, sa fille les bras ouverts, la physionomie implorante. Leurs yeux s’obscurcirent, le pauvre père tomba dans cette étreinte aimée, et mêla ses larmes à celles de son enfant. Une minute s’écoula, indicible intervalle de rémission heureuse, et il ne se fit qu’un bruit de hoquets singultueux et de pleurs. Tout à coup, à travers ses larmes, le duc aperçut en face la physionomie sombre et fatale d’Olivia. — Alors, se détachant de cette étreinte, il tomba à genoux et s’écria d’une voix implorante et désespérée.

— Ophélia, mon enfant, dis-nous la vérité !…

— Ah ! mon pauvre père, répondit la jeune fille, je suis bien malheureuse !…

Le lendemain, à l’heure du repas, Ophélia ne vint pas s’asseoir à côté de son père. On la chercha longtemps ; on ne la trouva pas. Le vieillard, sans mot dire, blanc comme ses cheveux, monta dans la chambre haute où la mort s’était déjà montrée. Il n’y avait personne.

Quelques montagnards racontèrent avoir, pendant la nuit, aperçu une ombre blanche sur les rochers de la montagne qui se penchent sur les torrents de la Findhorn, et que cette ombre pâle avait tout à coup disparu à leurs yeux. — Le vieux duc versa longtemps des larmes et se vêtit de noir. Sa fille se jeta dans ses bras les yeux secs, mais couvert de ses pleurs, le vieillard ne s’en aperçut point.