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le vampire.

ques faibles lueurs observant péniblement leur consigne. L’ameublement de cette pièce paraissait plus bizarre que pauvre. Les murailles se recouvraient frileuses d’une tapisserie ajourée en maints endroits et dont la trame ne conservait plus que la trace des couleurs. L’air froid que refoula la porte en se refermant, agita toute cette tenture et fît osciller un moment deux portraits en loques, continuellement cadastrés dans leurs cadres dédorés par les fils géométriques de plusieurs générations d’araignées. La bouche de ces personnages ainsi représentés souriait depuis un siècle. Étrange idée de sourire ainsi à son peintre pour laisser à sa famille une image qui semble la railler sans cesse dans les douleurs de la vie ! Le seul meuble qui apparut à l’œil était un bahut à tiroirs bombés comme les flancs d’une galiote hollandaise, ornés de ciselures ayant l’aspect de rides de vieillard, et plaqués d’obronières de cuivre dessinant des dragons ailés qui se tordaient autour des serrures en des contours burlesques et menaçants. Les sièges, de forme surannée, ne se ressemblaient pas plus que ceux d’un magasin de revendeur de meubles. Une bibliothèque de bois noir blanchi par le temps et la poussière, se tenait raide contre la tapisserie, et ses rayons étaient bourrés de livres antiques et de paperasses jaunes et recroquevillées.

Près d’une table massive, recouverte d’un tapis à dessins effacés, assis sur un fauteuil à siège bas et dossier haut, figurait un individu qui paraissait vivant. C’était un vieillard d’un sec et d’un décrépit à réjouir Hoffmann. Il s’enveloppait d’une robe de chambre collante de couleur souffreteuse et qui, tout en cachant ses bras, lui donnait l’aspect d’une momie de Memphis. Sa coiffure consistait