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que si l’on admet que les problèmes relatifs à la violence sont demeurés jusqu’ici très obscurs pour les plus instruits des socialistes.

Il ne faut pas examiner les effets de la violence en partant des résultats immédiats qu’elle peut produire, mais de ses conséquences lointaines. Il ne faut pas se demander si elle peut avoir pour les ouvriers actuels plus ou moins d’avantages directs qu’une diplomatie adroite, mais se demander ce qui résulte de l’introduction de la violence dans les relations du prolétariat avec la société. Nous ne comparons pas deux méthodes de réformisme, mais nous voulons savoir ce qu’est la violence actuelle par rapport à la révolution sociale future.


Plusieurs ne manqueront pas de me reprocher de n’avoir donné aucune indication utile propre à éclairer la tactique : pas de formules, pas de recettes ! Mais alors à quoi bon écrire ? Des gens perspicaces diront que ces études s’adressent à des hommes qui vivent en dehors des réalités journalières, du vrai mouvement, c’est-à-dire en dehors des bureaux de rédaction, des parlottes de politiciens ou des antichambres des financiers socialistes. Ceux qui sont devenus savants en se frottant de sociologie belge m’accuseront d’avoir l’esprit plutôt tourné vers la métaphysique[1] que vers la science. Ce sont des opinions qui ne me touchent guère, attendu que

  1. Cette prévision s'est réalisée ; car dans un discours du 11 mai 1907, à la Chambre des députés, Jaurès m’a appelé « le métaphysicien du syndicalisme », sans aucun doute avec une intention ironique.