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entretenaient ou perfectionnaient les doctrines ; l’élite qui donnait l’assaut aux positions ennemies, recevait des concours matériels et moraux de la masse qui voyait en elle la réalité du christianisme. Suivant les points de vue auxquels on se placera, on aura le droit de considérer la société comme une unité ou comme une multiplicité de forces antagonistes : il y a une approximation d’uniformité économico-juridique généralement assez développée pour qu’on puisse dans un très grand nombre de cas, ne pas se préoccuper de l’absolu religieux qui est représenté dans l’Eglise ; d’autre part il y a beaucoup de questions très importantes qu’on ne saurait comprendre sans se représenter l’activité des institutions de combat comme prépondérante.

Des observations assez analogues peuvent être faites à propos des organisations ouvrières ; elles semblent devoir se diversifier à l’infini, au fur et à mesure que le prolétariat se sentira davantage capable de faire figure dans le monde ; les partis socialistes se croient chargés de fournir des idées à ces organisations[1], de les conseiller et de les grouper en une unité de classe, en même temps que leur action parlementaire établirait un lien entre le mouvement ouvrier et la bourgeoisie ; et on sait que les partis socialistes ont emprunté à la démocratie son grand amour de l’unité. Pour bien comprendre la réalité du mouvement révolutionnaire, il faut se placer à un point de vue diamétralement opposé à celui auquel se placent les politiciens. Un grand nombre d’organisations sont

  1. Prétention d’autant plus saugrenue que les partis manquent d’idées qui leur soient propres.