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réguliers qui sont voués à l’absolu. Le catholicisme se trouve, en raison de ses spécialisations religieuses, dans de bien meilleures conditions que le protestantisme : un vrai chrétien, suivant les principes de la Réforme, devrait pouvoir passer, à volonté, du type économique au type monacal ; cette alternance est beaucoup plus difficile à obtenir d’un individu que l’exacte discipline d’un ordre monastique. Renan a comparé les petites congrégations anglo-saxonnes aux couvents[1] ; ces groupes nous montrent que le principe de la Réforme est applicable pour des natures exceptionnelles ; mais l’action de ces sociétés est généralement moins féconde que celle du clergé régulier, parce qu’elle est moins soutenue par le grand public chrétien. On a souvent fait observer que l’Église adopta, avec une extrême facilité, les nouveaux systèmes qui furent mis en pratique, par des fondateurs d’ordres, en vue d’assurer la vie spirituelle ; par contre, les pasteurs protestants ont été, presque toujours, fort hostiles aux sectes ; c’est ainsi que l’anglicanisme a beaucoup à se repentir d’avoir laissé échapper les méthodisme à son contrôle[2].

La majorité des catholiques a pu ainsi demeurer étrangère à la poursuite de l’absolu et cependant collaborer très efficacement à l’œuvre de ceux qui, par le combat,

  1. Renan, op. cit., p. 627.
  2. On a souvent cité à ce sujet une phrase de Macaulay, faisant observer que si Wesley avait été catholique, il eût sans doute fondé un grand ordre religieux (Macaulay. Essais philosophiques, trad. franc., p. 275 ; Brunetière, op. cit., pp. 37-38). — L’Amérique paraît mieux utiliser le zèle de ses sectaires que ne fait l’Angleterre.