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point qu’il pourrait en remontrer à M. Homais lui-même. La partie du clergé, qui se pique d’être à la hauteur des difficultés actuelles, a découvert le transformisme et aime à s’enivrer de discours sur le développement ; mais il y a bien des manières d’entendre ces mots ; 11 n’est pas douteux que pour les abbés modernes, plus ou moins traités de modernisme, évolution, adaptation et relativité correspondent à un même courant d’idées. En se proclamant transformistes, les catholiques veulent combattre l’ancien fanatisme pour la vérité, se contenter des théories les plus commodes, et n’avoir sur toutes choses que des opinions propres à leur concilier la faveur des gens indifférents en matière religieuse. Ce sont des pragmatistes d’un genre assez bas.

Il existe une bien grande différence entre la doctrine de l’harmonie et les bafouillages transformistes qui plaisent tellement aux catholiques actuels. La première convenait à une Église active, puissante, toute pleine de l’idée d’absolu, qui condescendait souvent à limiter ses exigences pour ne pas trop gêner le fonctionnement de l’État, mais qui lui imposait, aussi souvent qu’elle pouvait, l’obligation de reconnaître les droits infinis qu’elle tenait de Dieu. Le second système convient à des gens dont la faiblesse a été éprouvée par de nombreuses défaites, qui vivent toujours dans la crainte de recevoir de nouveaux coups, et qui s’estiment trop heureux quand ils obtiennent un délai suffisant pour pouvoir contracter des habitudes conformes aux exigences des maîtres. Cette tactique si savante n’a pas fort réussi à l’Église ; Léon XIII a été souvent célébré par les républicains et traité par eux de grand pape parce qu’il conseillait aux