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effrayer ses aimables admiratrices ; il ajoute donc qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une religion chargée de dogmes, une religion analogue au christianisme ; le sentiment religieux pourrait suffire. Après lui, il n’a pas manqué de bavards pour nous entretenir de ce vague sentiment religieux qui pourrait suffire pour remplacer les religions positives qui s’effondrent. F. Buisson nous apprend qu’il « restera non pas une doctrine religieuse, mais une émotion religieuse qui, bien loin de contredire ou la science, ou l’art, ou la morale, ne fera que les replonger dans le sentiment d’une profonde harmonie avec la vie de l’Univers »[1]. Voilà, si je n’ai la berlue, du triple galimatias.

« De quoi vivra-t-on après nous ? » Voilà le grand problème que Renan a posé et que la bourgeoisie ne résoudra pas. Si l’on pouvait avoir quelque doute sur ce point, les niaiseries que débitent les moralistes officiels démontreraient que la décadence est désormais fatale ; ce ne sont pas des considérations sur l’harmonie de l’Univers (même en personnifiant l’Univers), qui pourront donner aux hommes ce courage que Renan comparait à celui que possède le soldat montant à l’assaut. Le sublime est mort dans la bourgeoisie et celle-ci est donc condamnée

    française : « Si vous voulez savoir pourquoi Racine et Molière, par exemple, n'ont pas atteint cette profondeur de pensée que nous trouvons dans un Shakespeare, ou dans un Gœthe. ... cherchez la femme, et vous trouverez que la faute en est à l'influence des salons et des femmes. » (Évolution des genres, p. 128.)

  1. Questions de morale (conférences par plusieurs professeurs) dans la Bibliothèque des sciences sociales. p. :{2S.