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formation d’un parti agrarien[1] ; le résultat n’a pas répondu aux espérances des promoteurs des syndicats agricoles, mais il aurait pu être sérieux ; pas un instant Waldeck-Rousseau ne s’en est douté ; sa circulaire ne laisse même pas voir qu’il ait soupçonné les services matériels que les nouvelles associations devaient rendre à l’agriculture[2]. S’il avait eu l’idée de ce qui pouvait se passer, il aurait pris des précautions dans la rédaction de la loi ; il est certain que ni lui, ni la commission ne comprirent l’importance du mot « agricole », qui fut introduit, par voie d’amendement, à la demande d’Oudet, sénateur du Doubs[3].

Des associations ouvrières dirigées par des démocrates, usant de ruses, de menaces et parfois aussi quelque peu de violence, pouvaient rendre les plus grands services au gouvernement dans sa lutte contre les conservateurs alors si menaçants. Les personnes qui ont récemment transformé Waldeck-Rousseau en père de la patrie, ne manqueront pas de se récrier contre une interprétation aussi

  1. De Rocquigny, Les syndicats agricoles et leur œuvre, p. 42, pp. 391-394.
  2. Cela est d’autant plus remarquable que les syndicats sont représentés dans la circulaire comme pouvant aider l’industrie française à lutter contre la concurrence étrangère.
  3. On crut qu’il s’agissait de permettre aux ouvriers ruraux de se syndiquer ; Tolain déclara, au nom de la Commission, qu’il n’avait jamais songé à les exclure du bénéfice de la nouvelle loi. (De Rocquigny, op. cit., p. 10.) En fait, les syndicats agricoles ont servi d’agences commerciales aux chefs de culture.