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tromper leurs lecteurs, ils ont fini par perdre tout sens de la discussion honnête. Dans l’Aurore du 4 septembre 1905, Clemenceau reproche à Jaurès d’embrouiller l’esprit de ses partisans « en des subtilités métaphysiques où ils sont incapables de le suivre » ; il n’y a rien à objecter à ce reproche, sauf l’emploi du mot métaphysique ; Jaurès n’est pas plus métaphysicien qu’il n’est juriste ou astronome. Dans le numéro du 26 octobre, Clemenceau démontre que son contradicteur possède « l’art de solliciter les textes » et termine en disant : « Il m’a paru instructif de mettre à nu certains procédés de polémique dont nous avons le tort de concéder trop facilement le monopole à la congrégation de Jésus. »


En face de ce socialisme bruyant, bavard et menteur qui est exploité par les ambitieux de tout calibre, qui amuse quelques farceurs et qu’admirent les décadents, se dresse le syndicalisme révolutionnaire qui s’efforce, au contraire, de ne rien laisser dans l’indécision ; la pensée est ici honnêtement exprimée, sans supercherie et sans sous-entendus ; on ne cherche plus à diluer les doctrines dans un fleuve de commentaires embrouillés. Le syndicalisme s’efforce d’employer des moyens d’expression qui projettent sur les choses une pleine lumière, qui les posent parfaitement à la place que leur assigne leur nature et qui accusent toute la valeur des forces mises en jeu. Au lieu d’atténuer les oppositions, il faudra, pour suivre l’orientation syndicaliste, les mettre en relief ; il faudra donner un aspect aussi solide que possible aux groupements qui luttent entre eux ; enfin on représentera les mouvements des masses révoltées de telle