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croit que la seule arme à employer pour faire marcher la bourgeoisie est la peur ; sans doute, la peur est une arme excellente, mais elle pourrait provoquer une résistance obstinée si l’on dépassait une certaine mesure. Vaillant n’a pas, dans l’esprit, les remarquables qualités de souplesse et peut-être même de duplicité paysanne qui brillent chez Jaurès et qui l’ont fait souvent comparer à un merveilleux marchand de bestiaux.

Plus on examine de près l’histoire de ces dernières années, plus on reconnaît que les discussions sur les deux méthodes sont puériles : les partisans des deux méthodes sont également opposés à la violence prolétarienne, parce que celle-ci échappe au contrôle de gens dont la profession est de faire de la politique parlementaire. Le syndicalisme révolutionnaire n’a pas à recevoir l’impulsion des socialistes dits révolutionnaires du parlement.


II


Les deux méthodes du socialisme officiel supposent une même donnée historique. Sur la dégénérescence de l’économie capitaliste se greffe l’idéologie d’une classe bourgeoise timorée, humanitaire et prétendant affranchir sa pensée des conditions de son existence ; la race des chefs audacieux qui avaient fait la grandeur de l’industrie moderne disparaît pour faire place à une aristocratie ultra-policée, qui demande à vivre en paix. Cette dégénérescence