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tiques. Si le peuple en corps ou une partie du peuple a la souveraineté, on a la démocratie ou l’aristocratie ; si le pouvoir est exercé par un seul, d’après des lois fixes et stables, on a la monarchie ; s’il est exercé arbitrairement, par la seule volonté ou le caprice du souverain, on a le despotisme. Cette classification a été critiquée. Montesquieu confond la constitution de l’État, qui peut être autocratique, oligarchique, aristocratique ou démocratique, avec le gouvernement de l’État, qui est nécessairement monarchique ou républicain. Les types fondamentaux de constitution et de gouvernement se combinent les uns avec les autres et produisent les systèmes mixtes. Mais il n’y a pas lieu d’insister ici sur ces distinctions. Pour Montesquieu, elles ne sont qu’un cadre, et l’important est de voir comment il y a disposé son tableau.

On y remarque deux groupes principaux : les lois qui résultent de la nature du gouvernement, ce sont les lois politiques ; celles qui résultent du principe du gouvernement, ce sont plus particulièrement les lois civiles et les lois sociales. Montesquieu montre les causes de durée et de corruption des unes et des autres, « La corruption de chaque gouvernement, dit-il, commence presque toujours par celle des principes. » C’est sur ce sujet qu’il s’élève le plus haut, et qu’il donne, à vrai dire, l’essence même de sa pensée, le grand et bienfaisant conseil de son ouvrage. « La coutume, avait dit Pascal après une lecture de Montaigne, fait toute l’équité, par cette seule raison qu’elle est reçue ; c’est le fon-