Page:Sorel - Montesquieu, 1887.djvu/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’étaient les déboires du succès ; il en goûta toutes les satisfactions, qui étaient faites pour le consoler. Il vint à Paris ; il avait trente-trois ans, et, comme il a pris soin de le dire, il aimait encore. Il se répandit dans cette société galante et lettrée qui était l’enchantement du siècle et qui en demeure la parure. Il connut Maurepas, le comte de Gaylus, le chevalier d’Aydies, qu’il estimait si fort et pour lequel il semble avoir écrit cette pensée : « Je suis amoureux de l’amitié. » Il fréquenta chez Mme  de Tencin, chez Mme  de Lambert, chez Mme  du Deffand ; il fut admis à Chantilly chez le duc de Bourbon. Il y rencontra Mme  de Prie, qui faisait les honneurs de ce prince, ceux de son château et ceux de son gouvernement. Montesquieu sut gagner les bonnes grâces de cette favorite. Il aurait souhaité, dit-on, de se faire distinguer davantage de la sœur du duc, Marie-Anne de Bourbon, Mlle  de Clermont. Elle avait vingt-sept ans, de la beauté, de l’éclat, de l’enjouement surtout. Nattier l’a peinte en naïade très vive de couleur et très insinuante. La tradition veut que Montesquieu ait été ébloui de ses charmes et qu’il ait, pour lui faire sa cour, composé le Temple de Gnide.

C’est un petit poème en prose, qu’il suppose traduit du grec. « Il n’y a, dit-il, que des têtes bien frisées et bien poudrées qui connaissent tout le mérite du temple de Gnide. » Il en constate ainsi le caractère artificiel et l’anachronisme ; il le range parmi les brimborions que la futilité de son siècle a légués à la curiosité du nôtre. De ce bouquet aux