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leur orgueil — commerce des grands États monarchiques, — et « le commerce d’économie », qui vit des transports et des commissions — commerce des républiques et des pays peu étendus. Bien que Montesquieu découvre de la grandeur dans le commerce des Anglais, le négoce lui semble, en soi, une affaire de petit gouvernement et de petites gens. Les Romains le dédaignaient, et la monarchie française a de plus nobles soucis. Sans doute la richesse est quelque chose, et la richesse publique tend à se transformer par l’extension des valeurs mobilières. Montesquieu le discerne fort bien. Il va plus loin. « Le peuple qui possède le plus de ces effets mobiliers de l’univers, est le plus riche », dit-il. Mais il n’envie point cette supériorité pour sa patrie. Honneur et richesse, c’est-à-dire honneur et commerce, ne sauraient aller de pair : j’entends cet honneur féodal qui est le principe du gouvernement monarchique.

Quant à l’autre, l’honneur populaire ou bourgeois, Montesquieu estime, au contraire, que cet honneur est l’âme et le soutien du négoce. S’il opine sur le commerce en parlementaire, avec ses préjugés, il en décide en bon magistrat. Ses considérations sur les dangers de la spéculation et du jeu substitués au travail des affaires, sur la nécessité de maintenir dans sa rigueur la législation sur les faillites, méritent d’être d’autant plus méditées que les faits ont plus fortement justifié ses prévisions. Il a des données fort justes sur la liberté du taux de l’intérêt et sur le change.

Quelques lignes de lui posent plus clairement