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LE MARCHAND.

Vois ce que tu fais.

NÉOPTOLÈME.

C’est tout vu depuis longtemps.

LE MARCHAND.

Je t’en rendrai responsable.

NÉOPTOLÈME.

Soit ; mais parle.

LE MARCHAND.

Je parlerai : sache donc que ces deux guerriers que j’ai nommés, Diomède et Ulysse, sont partis, après avoir fait serment de ramener Philoctète, ou par la parole et la persuasion, ou en ayant recours à la force. Tous les Grecs ont entendu Ulysse s’en vanter hautement ; car il montrait plus que l’autre la confiance de réussir.

NÉOPTOLÈME.

Comment donc les Atrides, après tant d’années, ont-ils pris un si vif intérêt à un homme qu’ils avaient si longtemps abandonné ? Quel regret est entré dans leur cœur ? ou bien craignent-ils la puissance céleste et la vengeance des dieux qui punissent le crime ?

LE MARCHAND.

Je t’apprendrai tout ce qui se passe, car peut-être la nouvelle n’est-elle pas venue à toi ? Il y avait à Troie un devin, fils de Priam, nommé Hélénos ; ce fourbe, de noble race, Ulysse, digne des noms les plus odieux et les plus outrageants, sortit seul du camp pendant la nuit, l’emmena prisonnier, et fit voir à tous les Grecs cette riche proie ; entre autres oracles, Hélénos dit aux Grecs qu’ils ne renverseraient jamais les tours de Troie, s’ils ne parvenaient par la persuasion à tirer Philoctète de cette île qu’il habite. Le fils de Laërte, dès qu’il entendit ces paroles, promit aussitôt de ramener Philoctète parmi les Grecs ; il espérait l’amener de son consentement, ou triompher de sa résistance ; et il offrait sa tête à qui veut la prendre, s’il ne réussit pas. Maintenant tu sais tout,