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ser par une mort douce et paisible sur les bords du Styx, au séjour des morts, qui nous reçoit tous[1]. Car après tant d’infortunes si peu méritées, il serait juste que la fortune t’accordât ses faveurs.

(Antistrophe.) O Divinités infernales[2] ! et toi, monstre indomptable, qui, couché aux portes des enfers, pousses du fond de ton antre d’horribles hurlements, gardien vigilant, et toi, fille de la Terre et du Tartare[3], ouvre un libre accès à ce vieillard, prêt à descendre au ténébreux séjour des morts ; je t’en conjure, toi qui endors tous les hommes.



UN MESSAGER.

Citoyens, je veux vous apprendre en peu de mots qu’Œdipe est mort ; mais un court récit ne saurait suffire à redire tout ce qui s’y est passé.

LE CHŒUR.

Il est donc mort, l’infortuné ?

LE MESSAGER.

Il a terminé la triste vie qu’il n’avait cessé de mener.

LE CHŒUR.

De quelle manière ? sans doute avec une assistance divine et sans souffrance ?

LE MESSAGER.

Oui, et la chose est vraiment merveilleuse. Vous avez vu vous-mêmes comme il est sorti d’ici, sans aucun guide, mais c’est lui-même qui nous guidait tous. Arrivé aux bords de ce gouffre[4], qui repose sur des fondements d’airain, il s’est arrêté dans un des nombreux sentiers

  1. Τὰν παγκευθῆ νεκρῶν πλακα, ce que dans Antigone, v. 804 et 810, le poète appelle τὸν παγκοίταν θάλαμον, et ὀ παγκοιτας ῍Αδας.
  2. Les Euménides.
  3. La Mort.
  4. On disait que ce gouffre était l’entrée des enfers, par où Proserpine avait été enlevée par Pluton, et par où Thésée et Pirithoüs étaient descendus aux enfers. (Voyez la note sur le vers 57, dans la deuxième scène.) Χάλκεος οὺδός est regardé comme le revêtissement en pierre d’un précipice.