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père, ni celle que Laïus subirait de la main de son fils le sort cruel par lui redouté. Telles étaient cependant les prédictions de l’oracle ; mais ne t’en inquiète point : car les choses qu’un dieu croit utile de chercher, il saura bien les manifester lui-même.

ŒDIPE.

En écoutant ce récit, ô femme, quels doutes agitent mon esprit incertain ! quel trouble s’empare de mon cœur !

JOCASTE.

Quelle inquiétude te bouleverse et te fait parler ainsi ?

ŒDIPE.

Je crois t’avoir entendu dire que Laïus fut tué dans un chemin qui se partage en trois sentiers.

JOCASTE.

On le disait ainsi, et ce bruit n’a pas encore été démenti.

ŒDIPE.

Et en quel pays est le lieu où arriva ce malheur ?

JOCASTE.

On appelle ce pays la Phocide, c’est l’endroit où les routes de Delphes et de Daulie se rejoignent[1].

ŒDIPE.

Et combien de temps s’est écoulé depuis cet événement ?

JOCASTE.

Un peu avant le temps où tu devins roi de ce pays, la nouvelle de ce fait fut annoncée à Thèbes.

ŒDIPE.

O Jupiter ! qu’as-tu résolu de faire de moi ?

JOCASTE.

Qu’y a-t-il donc là, Œdipe, qui effraye ton esprit ?

  1. Daulie ou Daulis, petite ville de la Phocide, un peu à l’orient de Delphes. Strabou, l. IX, p. 423 B. Σχιστὴ όδός, nom que garda toujours le lieu où Œdipe tua Laïus. Pausanias, l. X, c. 5, 3.