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mal présent, nous fit oublier un crime encore obscur[1].

ŒDIPE.

Eh bien ! je remonterai à la source du fait, et le mettrai en lumière. Il est digne d’Apollon, il est digne de toi, d’avoir montré cette sollicitude pour celui qui a péri, vous trouverez donc en moi un auxiliaire légitime, vengeur à la fois de ce pays et du dieu. Ce n’est pas pour un ami étranger, c’est pour moi-même que j’effacerai cette souillure. Le meurtrier, quel qu’il soit, voudrait peut-être aussi porter sur moi sa main homicide ; en vengeant Laïus, je me défends donc moi-même. Enfants, relevez-vous au plus tôt[2], et remportez ces rameaux suppliants ; qu’un autre assemble ici le peuple de Cadmus ; je suis prêt à tout faire. Car ou nous serons heureux en obéissant au dieu, ou nous tomberons dans l’abîme du malheur.

LE GRAND PRÊTRE.

Enfants, levons-nous ; le secours que nous sommes venus demander ici, le roi nous l’annonce. Puisse Apollon, qui nous envoie ces oracles, être notre sauveur, et mettre fin au fléau qui nous désole !



LE CHŒUR.

(Strophe 1.) O douce parole de Jupiter, échappée du riche sanctuaire de Delphes, que viens-tu annoncer enfin à la brillante ville de Thèbes ? Saisi d’une sainte horreur, mon cœur frémit, il palpite d’effroi, ô Apollon, dieu de Délos, médecin de tous les maux, attendant avec un respect religieux le sort que tu me réserves maintenant ou dans l’avenir. Réponds-moi, fils de la riante espérance, Oracle immortel[3].

  1. C’est-à-dire, dont l’auteur et les circonstances étaient difficiles à découvrir.
  2. βάθρων, « des degrés de l’autel. » Œdipe ordonne ici d’enlever les rameaux qui avaient été déposés sur l’autel, comme symboles de supplications. Voyez les Suppliantes d’Euripide, vers 32.
  3. Φάμα. Cette personnification poétique de l’oracle reviendra aussi dans le second Chœur, v. 475.