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SOMMAIRE DE L’ACTE II.

L’ouverture de cet acte n’est guère moins belle que celle du premier.

Le peuple, convoqué par l’ordre du roi, est assemblé devant le palais. Œdipe rentre en scène, fulmine d’avance les châtiments et les imprécations les plus terribles contre le meurtrier de Laïus. Il engage le peuple à l’aider et à faire en sorte de découvrir le coupable. Le chœur conseille au roi de faire venir Tirésias le devin. Le roi répond que Créon lui a déjà donné le même avis, qu’en conséquence il a envoyé pour la seconde fois chercher ce sage interprète des Dieux, si révéré dans Thèbes ; il s’étonne que Tirésias tarde si longtemps. Le vieillard aveugle, à qui le ciel a donné la connaissance de ce qu’il y a de plus secret, est amené sur la scène. Ce personnage très-bien adapté au sujet, quoi qu’on en ait dit, produit une curiosité mêlée de terreur. Le devin inspiré résiste longtemps avant de s’expliquer. Il maudit la science qui lui révèle d’horribles mystères. Les menaces violentes et les injures d’Œdipe le poussent à lui déclarer que lui-même Œdipe est ce parricide voué à la vengeance divine et humaine. Puis il lui fait entendre moins clairement le reste de cette fatale destinée qui doit le faire reconnaître incestueux et parricide. Œdipe, transporté de fureur, menace Tirésias. Il se persuade que cette accusation a été concertée artificieusement avec Créon dont l’ambition aspirait au trône. Il ne trouve rien dans les paroles de Tirésias qui puisse le concerner ; on voit ici clairement que l’action suit une progression dramatique. Œdipe est déclaré coupable, mais il a trois raisons de se croire innocent : 1° Il n’a point la conscience d’avoir commis un parricide ; 2° il soupçonne la véracité de Tirésias dont il a excité la colère ; 3° Créon voyait de mauvais œil qu’un prince étranger occupât le trône, et c’était lui qui avait conseillé à Œdipe de faire venir Tirésias : ce qui rendait ce devin d’autant plus suspect a ce monarque. Aussi le chœur conclut-il qu’il ne faut point croire le prophète.

Cependant toutes ces circonstances troublent, tourmentent et déchirent l’esprit et le cœur du roi. Il accuse Créon, tandis que lui-même est inculpé par Tirésias. De là naît cette contestation très-désagréable, par suite de laquelle nous voyons dans ce deuxième acte Œdipe soupçonneux, dur et emporté, de paisible et de très-bon prince qu’il paraissait être au premier acte.

On voit que l’ordonnance de ce second acte est une suite de celle du premier. Œdipe reparaît, non plus en roi simplement compatissant, mais en roi agissant et législateur, qui, pour commencer d’obéir a l’oracle, oblige ses sujets à lancer avec lui l’anathème sur le coupable. Quel retour préparé ! on consulte, on délibère, on examine les moindres lueurs. Tirésias appelé, vient ; il va tout déclarer… Mais quelle apparence qu’il soit cru d’Œdipe, du peuple et des spectateurs ! Œdipe passe pour fils de Polybe. De là la