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Le Coryphée.De quelle race es-tu, étranger, par ton père, raconte-le.

Œdipe.(A Antigone.) Malheur à moi ! Que faut-il faire, mon enfant ?

Antigone.Parle, puisque tu es réduit à cette extrémité.

Œdipe.Eh bien, je parlerai, car je ne puis rien cacher.

Le Coryphée.Vous y mettez du temps ; voyons, hâte-toi.

Œdipe.Connaissez-vous un certain fils de Laïos ?

Le Coryphée.(Geste soudain d’horreur.) Oh ! Oh !

Œdipe.Et la famille des Labdacides ?

Le Coryphée.(Même geste.) O Zeus !

Œdipe.Un malheureux Œdipe ?

Le Coryphée.(Soupçonneux.) C’est toi ?

Œdipe.Ne vous effrayez pas de mes paroles.

Le Coryphée.(Toujours avec la même horreur.) Oh ! Oh !

Œdipe.Le sort lui a été contraire.

Le Coryphée.(Il s’écarte, détourne la tête.) Oh ! Oh !

Œdipe.(A Antigone.) Ma fille, que va-t-il arriver ?

Le Coryphée.(Dans un élan d’exécration.) Hors d’ici ! sortez du pays !

Œdipe.(Il reste immobile et froid.) Et ta parole, qu’en feras-tu ?

D’un seul trait, sans un arrêt.

Le Coryphée.Qui rend le mal pour le mal n’est exposé à aucune punition du Destin ; qui autorise les autres à le tromper, en les trompant lui-même, recueille non de la reconnaissance, mais de la peine. Quitte de nouveau ce siège,


    Ce serait une sottise et aucun éditeur ne l’a essayé. Comparons le commos du Philoctète 1081-1217. Les deux tragédies sont voisines de date et la technique y est la même. L’équilibre antistrophique n’est conservé que jusqu’à un moment précis. (Cf. p. 120, note.) Il en est de même ici. Quand le coryphée veut savoir qui est Œdipe, la