Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/232

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Philoctète. — Que dis-tu ? Est-ce qu’on me trompe encore une fois ?

Néoptolème. — Non, je le jure par la majesté souveraine de Zeus très saint.

Philoctète. — Comme tu dis là de douces paroles, si elles sont sincères !

Néoptolème. — Tu en auras une preuve manifeste : tends la main droite et sois maître de cet arc qui t’appartient.

A ce moment apparaît Ulysse.

Ulysse. — Et moi, je m’y oppose, les dieux m’en sont témoins, au nom des Atrides et de l’armée entière.

Philoctète.(A Néoptolème.) Mon fils, de qui est cette voix ? Est-ce Ulysse que j’entends ?

Ulysse. — Oui, sache-le, tu me vois et je t’emmènerai aux champs de Troie par la force, que le fils d’Achille le veuille ou non.

Philoctète.(Il met froidement une flèche sur la corde de son arc.) Mais cela te coûtera cher, si ce trait va droit au but.

Néoptolème.(Il se jette entre les deux hommes.) Ah ! non, par les dieux, non, ne tire pas.

Philoctète. — Lâche-moi, lâche ma main, au nom des dieux, cher enfant.

Néoptolème. — Impossible.

Pendant cette courte lutte Ulysse a disparu.

Philoctète. — Ah ! mon ennemi, l’être que je hais, pourquoi m’as-tu empêché de le tuer avec mes flèches ?

Néoptolème. — Mais pour moi, c’est un crime, comme pour toi.

Philoctète. — Sache du moins ceci : les premiers de l’armée, ces hérauts fanfarons des Achéens, s’ils sont braves en paroles, sont lâches en face d’une arme.

Néoptolème. — Soit. Maintenant donc que tu es en