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douloureux, de loin un cri vient jusqu’à moi ; il défient distinct.

La voix se rapproche : elle grandit.
Même mouvement.

Le Chœur.Souviens-toi, mon fils…

Néoptolème.De quoi ?

Le Chœur.De ton nouveau rôle : l’homme n’est pas loin, il est dans le voisinage. — (Il prête l’oreille.) Ce n’est pas le bruit d’une syrinx qu’il fait entendre, comme un berger des champs, mais ou bien il a heurté son pied quelque part et de douleur il pousse des cris qu’on entend au loin, ou bien il aperçoit notre navire à son mouillage inhospitalier : sa clameur est effrayante.

A cet instant Philoctète arrive sur la scène, en boitant.

Philoctète. — Ah ! étrangers, qui êtes-vous ! Comment à la rame[1] avez-vous pu aborder sur cette terre qui n’a pas de ports, qui n’est pas habitée ? Quelle peut bien être votre patrie, votre race ? Sans doute, vous portez le vêtement grec qui m’est si cher, mais votre voix, je veux l’entendre. Ne craignez rien, ne vous effrayez pas de mon aspect sauvage. Au contraire, ayez pitié d’un être malheureux, seul, abandonné comme vous voyez, sans soutien ; il vous en prie, parlez-lui, si c’est en amis que vous êtes venus. Mais répondez[2] : il faut bien que vous m’adressiez la parole, comme je le fais moi-même.

Néoptolème. — Eh bien, étranger, sache-le d’abord ; nous sommes Grecs, puisque c’est cela que lu veux apprendre.

  1. Sur le texte de ce vers cf. vol. I, Introduction, p. XX.
  2. Néoptolème hésitant à parler, Philoctète s’impatiente : il veut