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NÉOPTOLÉMOS.

Cela est nécessaire par-dessus tout. Ne t’irrite donc pas quand tu m’auras entendu.

PHILOKTÈTÈS.

Je meurs, malheureux ! Je suis trahi. Tu m’as tendu ce piége ! Rends-moi tout d’abord l’arc et les flèches.

NÉOPTOLÉMOS.

Cela ne se peut. La justice et l’intérêt me contraignent d’obéir aux chefs.

PHILOKTÈTÈS.

Ô feu ! Ô vraie horreur ! Très-détestable ouvrier des plus mauvaises ruses ! Que m’as-tu fait ? Par quels mensonges m’as-tu joué ? N’as-tu point honte de me regarder, moi qui me suis roulé à tes pieds, moi qui t’ai supplié, ô misérable ? En m’arrachant mon arc tu m’as arraché la vie. Rends, je t’en conjure, rends, je t’en supplie, ô fils ! Je t’adjure par les Dieux de la patrie, ne m’enlève pas ma nourriture. Hélas ! malheureux que je suis ! Il ne me parle plus, et, comme s’il ne devait jamais me rendre mes armes, il détourne son visage. Ô ports ! Ô promontoires ! Ô cavernes des bêtes sauvages des montagnes ! Ô roches escarpées ! C’est à vous qui êtes mes compagnons accoutumés que je me plains des maux que me fait le fils d’Akhilleus, n’ayant nul autre à qui je puisse parler ! M’ayant juré qu’il me ramènerait dans ma demeure, il veut me conduire à Troia ; et mon arc, qu’il avait reçu de moi en m’engageant sa foi, il le retient, bien que ce soit l’arme sacrée de Hèraklès, fils de Zeus ! Et il veut le montrer