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EXPLIQUONS-NOUS


 
J’en fais humblement l’aveu :
Hier, infidèle à ta bouche,
À dame de noble souche
J’ai conté fleurette un peu.

Elle passait toute seule,
Mêlant, froide déité,
Les grâces de la beauté
Aux gravités d’une aïeule.

Fuyant tout contact grossier,
Elle marchait, solennelle,
Ange qui cachait son aile
Sous un vieux manteau princier !

Ô saison des fleurs écloses,
Comment peut-on vous mentir ?
Et j’ai voulu convertir
Cette âme au respect des roses.

J’ai voulu rouvrir ces yeux
Qui reniaient la lumière
Et la gaieté familière
Du printemps aimé des dieux.

Je l’ai prise par sa taille
Ronde et fine, en lui disant :
« Ô Marquise, viens-nous-en
Courir à deux la broussaille !

« Dans les plaines, sur les monts,
Le soleil des amours brille ;
Tout rayonne, chaste fille :
C’est le doux printemps… Aimons ! »

Or, Cupidon — tiens-en note ! —
La guettait sous les halliers…
Je l’ai, pieds et poings liés,
Livrée à ce dieu despote !

L’action est, j’en conviens,
Très brutale et très infâme ;
Mais, dans le fond de mon âme,
Je pense que j’ai fait bien.