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documents et notes sur le velay

coupe-jarrets, truands et ribauds, gens de sac et de corde, détrousseurs sans merci, larrons sans vergogne, mais partisans intrépides. Il vint à lui d’abord cent hommes, puis cinq cents, puis mille. Rodrigue avait jeté son dévolu sur la cause nationale et resta fidèle à Charles VII, mais il combattait en volontaire, dédaignait toute hiérarchie, brisait sans cesse avec la discipline et les ordres supérieurs, et pillait tout village et n’importe quelle ville à sa portée. C’était alors la coutume : chaque capitaine, armagnac ou bourguignon, louait pour un temps ses services, se joignait à tel ou tel parti, allait en avant au gré de son caprice ou de son intérêt, et surtout faisait main basse dans ses alentours, tombant sur les amis comme sur les ennemis avec une impartialité dérisoire ou plutôt une indifférence brutale. En 1423, Rodrigue, de concert avec l’amiral de France, Louis de Culant assiégeait la place forte de Cufy en Nivernais. Il reçut, en 1428, ses premières lettres patentes du roi et conduisit ses routiers en Languedoc contre André de Ribes, qui fut défait, pris et pendu. Suivant une tradition locale, confirmée par les chroniqueurs de l’époque[1], Rodrigue campait en 1430 dans les montagnes du Velay avec une armée véritable et deux de ses lieutenants, les nommés Valette et Thuron[2]. Sur la prière de Charles VII et moyennant finance, il consentit à rejoindre en Dauphiné les chefs de l’armée royale, Raoul de Gaucourt, gouverneur du Dauphiné, et Imbert de Groslée, Sénéchal de Lyon, pour combattre le prince d’Orange. C’est Rodrigue qui gagna en réalité la bataille d’Anthon (19 juin 1430), et tous les historiens reconnaissent la bravoure et surtout la science stratégique qu’il déploya en cette journée décisive pour les armes du roi. Jean Salazar, principal acolyte de Rodrigue, Valette et Rodrigue

  1. Quicherat, loc. cit., Histoire de Charles VII, par Vallet de Viriville, t. II, p. 259. — Sur la bataille d’Anthon, voir les chroniqueurs du temps, Monstrelet, Saint-Rémy, Jean Chartier et surtout Quicherat et Vallet de Viriville, loc. cit.
  2. On trouve aussi un certain Andrelin parmi les séides intimes de Rodrigue. Andrelin était peut-être un surnom de Valette ou de Thuron.