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tout contrôle désignaient à son orgueil solitaire la liberté de conscience comme l’ennemie traditionnelle des trônes. Aussi les protestants furent-ils, même avant la date fatale de 1685, l’objet continuel des mauvais vouloirs officiels. À partir de 1664 les injustes procédés commencèrent : un arrêt du conseil du 21 juillet de cette année annula toutes lettres de maîtrise octroyées par le roi, qui ne mentionneraient pas la profession catholique de l’impétrant. Les réformés ne devaient passer maîtres dans leurs métiers que par voie de chefs-d’œuvre. Après l’industrie, la famille : une déclaration du 24 octobre 1665 autorisa les enfants protestants à changer de foi, malgré leurs parents, dès l’âge de quatorze ans pour les garçons, de douze ans pour les filles. D’autres édits suivirent qui détruisaient l’égalité civile entre les membres de croyances diverses.

Le sage Colbert mit pour quelque temps un frein aux vexations prodiguées à des sujets laborieux et fidèles. De 1666 à 1671 les protestants crurent voir revenir les temps de Henri IV ; ce ne fut qu’une trève. À partir de 1674, les avanies, les mauvaises querelles, les édits et arrêts oppressifs reprirent leur cours. Nulle part la pression et l’intimidation ne sévirent avec autant de violence qu’en Languedoc[1]. Au mois de juillet 1679 furent supprimées les Chambres mi-parties, qui jugeaient les procès des réformés dans les parlements de Toulouse, de Bordeaux et de Grenoble. Le 10 octobre suivant, il fut interdit aux calvinistes de tenir des synodes sans la permission du roi et hors l’assistance d’un commissaire royal. Le 6 novembre, défense à tous seigneurs d’établir sur leurs fiefs des officiers de la religion prétendue réformée ; juin 1680, inhibition à tous catholiques d’apostasier sous peine de bannissement ; le 11 juillet enfin de la même année 1680, exclusion des huguenots des fermes du roi comme adjudicataires ou intéressés[2].

  1. Voir dans la Police sous Louis XIV de Pierre Clément, Paris, Didier, 1866, pp. 265 et suiv., le chapitre intitulé : Les Protestants.
  2. Histoire de France, d’Henri Martin, édition de 1870, t. XIII, pp. 600 et suiv.