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AGRÉGATION DE MÉDECINE

Ces absences qui se multiplieront forcément avec le nombre croissant des candidats, avant et pendant la durée du concours, cette obligation de tout sacrifier aux exigences d’un jury insuffisamment renseigné, finiront, nous en sommes convaincus, par faire à l’enseignement en général, et plus particulièrement à certains services, un tort considérable.

Parallèlement à ces absences des candidats, il importe de signaler aussi celles des professeurs désignés pour faire partie des jurys ; plus peut-être que les premières, celles-ci apporteraient au fonctionnement régulier. de certaines chaires des préjudices tout aussi importants. On a dit et répété bien souvent, en faveur de la centralisation des concours, que les choses se passaient ainsi pour les Facultés de Droit, et qu’il n’y avait pas de raisons pour qu’il n’en soit pas de même pour Îles Facultés de Médecine. Mais ainsi que le faisait remarquer, en 1881, dans son rapport à la Faculté de Médecine de Montpellier, M. le professeur Grasset, cette communauté « d’origine et de titre peut s’entendre quand, comme dans les Facultés de Droit les agrégés peuvent aller d’une ville à l’autre, finir même par être nommés à Paris. Rien de semblable ne se passe et ne peut se passer en médecine. On peut être appelé sur le papier agrégés des Facultés de Médecine, mais en fait on est toujours agrégé de telle ou telle Faculté.

« Un arrêté de décentralisation ne peut pas modifier un pareil état de choses ; nous ajouterons même qu’il serait regrettable qu’on y parvint. Le nombre des candidats augmenterait-il, le niveau du concours s’élèverait-il, qu’encore la centralisation des concours aurait un inconvénient fondamental.

« Lille tendrait à supprimer les Écoles, c’est-à-dire ces faisceaux de traditions, de principes, de travaux qui font la vie d’une Faculté. Elle créerait une science officielle, pas plus définitive qu’une autre, mais fixée au goût du jour par une seule Faculté qui ferait la loi sans contrôle. »

Il nous paraît inutile de rien ajouter aux éloquentes paroles de l’éminent professeur de Montpellier.

Vrai il y a dix-huit ans, ce langage emprunte une portée plus considérable, encore, depuis la création des Universités provinciales. Si l’on ne veut pas que ces centres intellectuels languissent et meurent avant d’avoir vécu, qu’on redoute cette centralisation excessive qui tend à tout uniformiser.

Qu’on cherche, au contraire, par tous les moyens possibles, à développer leur individualité, qu’on leur laisse pour cela l’initiative et l’indépendance suffisantes. Ce qu’il leur faut avant tout et dés le début, pour aider à leur développement, à leur vie morale aussi bien que scientifique, c’est la liberté !

Avec les concours à Paris, a-t-on dit, les candidats, sans rien perdre de leur originalité, peuvent profiter de ce qu’ils voient dans la capitale, ils peuvent s’y créer des relations utiles, arriver plus tard, grâce à ces relations, aux sociétés savantes ou trouver dans la presse médicale parisienne un accueil plus favorable, À ces objections on a cru devoir ajouter la crainte de retrouver plus tard, dans nos concours locaux, les mêmes inconvénients qui existent aujourd’hui pour les concours à Paris ; c’est-à-dire la partialité et l’influence prépondérante de certains juges en faveur de leurs élèves.