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REVUE INTERNATIONALE DE L’ENSEIGNEMENT

du P. C. N. littéraire, sans compter l’année de service militaire, ce qui fait un total de huit années. Huit ans, au bout desquels on obtient un titre d’une valeur purement platonique ne donnant directement accès à aucune carrière ; un apprentissage professionnel de plusieurs années est indispensable pour que le jeune docteur soit apte à exercer les fonctions d’avocat, d’avoué, de magistrat, de conseiller de préfecture[1], et cet apprentissage ne peut guère être fait en même temps que les études de doctorat, de sorte qu’un docteur en droit ne pourra commencer une carrière qu’environ dix ans après sa sortie du lycée. L’exagération est telle que la réforme projetée aboutirait inévitablement à écarter du doctorat toute clientèle autre que celle des aspirants à l’agrégation. Les praticiens, d’ordre judiciaire ou administratif, ont une foi médiocre dans l’utilité des études de doctorat ; ils sont déjà peu enclins à y pousser les licenciés et les détourneraient d’une manière complète si la durée des études était augmentée. Or, si les candidats au doctorat sont beaucoup trop nombreux à l’heure présente, par l’effet de la loi militaire, il demeure utile que les hautes études juridiques ne soient pas désertées d’une façon complète. Si l’augmentation du nombre des élèves en lettres doit être achetée à ce prix, la combinaison paraît désastreuse à tous égards. D’abord le P. C. N. littéraire ne remplacera pas, au point de vue de l’éducation juridique, les études de doctorat. D’autre part, le surcroît d’élèves procuré aux Facultés des lettres sera compensé par une perle correspondante pour les Facultés de droit, de sorte que la population scolaire des Universités restera la même, sans augmentation des ressources pécuniaires totales résultant du nombre des élèves.

VI

Les considérations qui précèdent semblent décisives, et votre commission croit devoir s’y tenir, sans s’attarder à l’exposé d’objections secondaires. Par exemple, elle pourrait appeler votre attention sur la situation que la réforme projetée ferait aux élèves ne commençant pas leurs études de droit au sortir du lycée, ne venant à nous qu’à un certain âge et déjà engagés dans une carrière. Sans doute ils ne forment qu’une petite part du contingent de nos élèves, mais non la moins méritante ni la moins capable. Peut-on songer à les astreindre aux études préparatoires qui nous occupent ?

Objection de détail, avons-nous déjà dit, et nous n’insistons pas. Les objections de principe sont assez graves pour que votre commission soit unanime à vous proposer le rejet du vœu qui vous est soumis.

Le Rapporteur,
R. Beudant.


    donné surtout la préparation juridique très faible de la plupart de ceux qui les abordent.
    Il est bien entendu que ces indications sur la durée des études de doctorat ne concernent que les candidats qui se contentent d’un seul diplôme de docteur. Les candidats aux diverses agrégations, obligés d’être docteurs in utroque, voient leurs études allongées par là de douze à dix-huit mois, délai nécessaire pour passer l’examen unique et écrire une seconde thèse.

  1. Les docteurs en médecine sont beaucoup plus favorisés. Sans doute leurs études sont longues et ont été peut-être légèrement allongées par la création de P. C. N. ; mais, dès la délivrance du diplôme, ils sont en état d’inaugurer sans délai l’exercice de leur profession.