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L’ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES

Un autre inconvénient des concours est de donner la préférence à la mémoire, à l’intelligence précoce et primesautière au dépens des esprits plus lents, plus attardés, plus méditatifs. Ils favorisent certaines races telles que les races latine et hébraïque, dont le développement corporel et intellectuel est plus rapide que celui des races celtique et germanique. Ils ne peuvent pas faire prévoir ce que sera l’homme futur. Combien ne voit-on pas de personnes capables, ayant acquis une haute position, dont la valeur ne s’est décelée que postérieurement à l’âge des concours.

Les concours et en particulier celui de l’École Polytechnique ont encore un effet fâcheux sur l’enseignement et sur la marche intellectuelle de la nation française, en faisant converger tous les efforts de l’enseignement secondaire vers les mathématiques. Les autres branches des sciences sont mises au second plan et traitées d’accessoires. On attire vers les mathématiques les meilleures intelligences dont beaucoup possèdent des aptitudes toutes différentes. Combien d’hommes sont entrés à l’École Polytechnique et ont ensuite tenu un rang honorable, mais modeste, comme ingénieurs ou comme militaires, que leurs dispositions naturelles appelaient à briller au premier rang dans d’autres carrières.

En raison de la faveur qui s’attache aux Écoles, par cela même que leur entrée est la récompense d’un concours, les Universités et particulièrement les Facultés des sciences n’ont comme élèves que ceux qui ont échoué au concours et ceux à qui l’âge, le peu de dispositions naturelles, ou les circonstances n’ont pas permis de concourir. Les Écoles sont donc pour les Universités une grande cause de faiblesse.

2o  Les Écoles possèdent des programmes très étendus et uniformes pour tous. Elles ont en effet un but spécial ; elles doivent former des élèves pour une certaine profession. Il faut donc qu’elles leur apprennent tout ce qui peut être utile à cette profession. Certainement il y a des cours plus importants les uns que les autres, mais on n’en peut négliger aucun. Tous font l’objet d’un examen et entrent en ligne de compte pour le classement de sortie. Cependant à mesure que les professions se spécialisent, les Écoles sont obligées de scinder leurs programmes. Ainsi à l’École centrale il y a cinq sections, plus apparentes, il est vrai, que réelles. L’École industrielle de Lille est aussi divisée en trois sections. Néanmoins par cela seul que les Écoles sont en quelque sorte responsables du savoir de leurs élèves, elles doivent exiger de tous une science uniforme, comprenant tout le programme.

De plus cette science nécessaire doit être assimilée dans le temps