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affranchissement, travaillent sans cesse à l'asservir sous de nouvelles formes. On veut bien le reconnaître légalement citoyen pour lui imposer des devoirs et exiger des services ; mais s'agit-il de lui assigner des droits, et surtout de les faire respecter, on montre ordinairement une grande parcimonie.

« La peine morale que l'indigène éprouve dans la condition qui lui est faite, doit aussi, à notre avis, entrer en ligne de compte dans son dépérissement. En face de notre supériorité tranchée, le Néo-Calédonien reste stupéfait et comme étourdi ; il a bien pu se faire illusion, un certain temps ; mais il na pas tardé à se reconnaître vaincu, et, en voyant ce qu’on exige de lui dans ses biens, dans sa personne, pourrait il ne pas songer à ce temps où il se sentait maître et libre comme l’oiseau de la forêt ? Pourrait-il, malgré son insouciance apparente, ne pas penser à l’avenir ? Or, ces considérations lui ôtent l’énergie et relâchent considérablement les ressorts nécessaires à sa vie.

« Outre cette raison morale, signalons encore quelques causes naturelles que nous pouvons généraliser d’un mot : le changement d’habitudes. Le missionnaire, ne pouvant laisser l’indigène dans l’état de nudité où il l’a trouvé, a dû s’efforcer de le faire sortir de sa paresse pour se procurer des vêtements. Un travail réglé et le port régulier des habits ne pouvaient, sans doute, que développer ses forces et le mettre à l’abri des transitions funestes du chaud au froid. Mais l’indigène ne sait ni se ménager, ni se couvrir avec prudence. Il prend, il quitte ses vêtements, il les porte dans un état de malpropreté dégoûtante, et souvent, après la pluie ou le bain, il les laisse sécher sur lui.

« Dans les rapports avec les centres de population, il y a, pour l'indigène, des inconvénients d'une toute autre gravité. D'abord, l'abus des boissons avec ses conséquences meurtrières, puis le libertinage et les nombreuses maladies qui en sont la suite amènent la dépopulation dans des proportions effrayantes.

« Les mesures de cantonnement par petites tribus ou fractions de tribus, prises dans des vues bienveillantes sans doute, nous paraissent plus qu’insuffisantes pour enrayer ce dépérissement. Selon nous, il eût fallu former des centres populeux, et donner à ce peuple enfant des protecteurs sérieux et de bons conseillers, possédant ce qui est nécessaire pour l'instruire, le former au travail, entretenir chez lui et perfectionner l'esprit de famille ; car, nous croyons pouvoir l'affirmer, parmi les tribus en rapport avec la race blanche, on remarque plus de vitalité dans toute tribu chrétienne que la foi met à l'abri des grands désordres.


1. Poste.   2. Caserne.   4. Carré des officiers.   5. Écurie.   6. Magasin général.   7. Logement des surveillants de 1re classe.
NOUVELLE-CALÉDONIE. — VUE GÉNÉRALE DU PÉNITENCIER DE L'ÎLE NOU (partie orientale).


La dépopulation se fait plus rapide chez celles qui ne sont pas retenues par le frein religieux.