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convocation de Pie IX. Puis le Concile interrompu, il se hâta de partir, car la guerre commençait rapide et terrible. D’immenses armées avaient envahi la France et menaçaient d’intercepter le chemin des ports et de couper les voies maritimes ; déjà la Lorraine était en feu ; les journaux avaient même apporté à Mgr Elloy la douloureuse nouvelle de l’incendie de son village natal, et il devait, en quittant la patrie en proie à des désastres inouïs, garder au fond du cœur le souci cuisant d’ignorer le sort de sa famille et de son vieux père, âgé de quatre-vingt-sept ans.

De retour au milieu de ses bien-aimés insulaires, l’apôtre, n’écoutant que l’héroïsme de son zèle, se remit à l’œuvre avec un nouveau courage. Il devait y succomber. Aussi, lorsque, vers la fin de 1877, Mgr Elloy revint en Europe, en le revoyant tel que l’avaient fait ses travaux, ses sollicitudes et les difficultés contre lesquelles il avait eu à lutter, ses frères en religion ne purent se faire d’illusion sur la gravité de son état.

Mgr Elloy vécut encore une année. I] mourut le 22 novembre 1878. Le diocèse d’Agen a reçu son dernier soupir, et garde sa dépouille mortelle dans la basilique de N.-D. de Bon-Encontre ; mais son cœur a traversé l’Océan et est allé reposer sur cette terre de Samoa qu’il trouva barbare et qu’il a faite chrétienne à force de l’aimer.




Mgr LAMAZE (Amand),
de la Société de Marie,
évêque titulaire d’Olympe, troisième vicaire apostolique de l’Océanie centrale.

Il y avait seize ans que ce missionnaire évangélisait l’archipel des Amis lorsqu’il fut appelé à succéder aux deux pontifes dont nous venons d’esquisser la biographie.

Né à Saint-Michel (Vosges), le 27 mars 1833, Mer Lamaze fut ordonné prêtre le 1er mai 1857. Après quatre ans de ministère dans le diocèse de Saint-Dié, il entra chez les Pères Maristes avec l’ardent désir d’être appelé un jour à évangéliser les infidèles. Destiné par ses supérieurs aux missions lointaines de l’Océanie, il quitta la France en novembre 1863 et arriva l’année suivante à Tonga.

Nous avons montré, p. 13, le P. Lamaze en train de bâtir à Maofaga une église digne de rivaliser avec les temples protestants. C’était en 1876. Hélas ! une épreuve amère lui était réservée.

« C’est du milieu des ruines, écrivait-il le 29 mars 1879, que je vous écris ces quelques lignes ; j’ai le cœur navré. Le premier vendredi de mars, nous venions de célébrer la messe et de faire la communion réparatrice, lorsqu’éclata une horrible tempête. Le soir, il fut impossible de réunir les fidèles pour la bénédiction du T. S. Sacrement. Nous étions blottis dans notre case tongienne, qui craquait de toutes parts et menaçait à chaque instant de nous écraser ; à dix heures et demie du soir, la nef de l’église, battue dans toute sa longueur par le vent d’est, céda et entraîna le chœur. La façade et les deux clochers tinrent bon jusqu’à quatre heures et demie du matin ; mais le vent, tournant au sud, s’engouffra dans le côté laissé ouvert par la chute de la nef et emporta le tout. C’est merveille qu’aucun de nous n’ait été tué ou blessé au milieu de cette grêle de branches d’arbres, de noix de cocos, de feuilles de zinc arrachées aux toitures et poussées de tous côtés par la violence du vent.

« Vous ne pouvez vous faire une idée de la destruction générale. J’estime que les pertes subies par la seule station de Maofaga peuvent s’élever à près de 60,000 fr. Mais surtout comment ne pas pleurer notre magnifique église, notre joie, l’orgueil du pays ? Du mieux que je puis, j’essaie de dire avec le saint homme Job : « — Dieu me l’avait donnée, il « me l’a ôtée : que son saint nom soit béni !» Nos néophytes ont été admirables de résignation, et sont les premiers à nous dire : « — Il faut refaire l’église, « et la refaire en pierre. » C’est un gros travail au moment où nous pensions nous reposer... Et puis où trouver des ressources ? »

Quand il écrivait ces lignes, l’humble et zélé religieux ignorait encore que le Souverain Pontife avait jeté les yeux sur lui pour remplacer Mgr Elloy.

Ce n’est que quelques mois plus tard qu’il reçut le premier avis de sa nomination comme évêque d’Olympe, vicaire apostolique de l’Océanie centrale et administrateur du vicariat de l’archipel des Navigateurs. Il revint aussitôt en France.

Mgr le cardinal Caverot, archevêque de Lyon, voulut sacrer lui-même dans l’église primatiale de Saint-Jean, le dimanche 22 décembre 1870, le prélat, auquel il avait conféré autrefois, à Saint-Dié, tous les ordres, depuis la tonsure jusqu’à la prêtrise. Son Éminence était assistée de Mgr Marchal, alors évêque de Belley, et de Mgr Bonnet, évêque de Viviers.