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Quand vous entasseriez victoire sur victoire
Pour redoubler l’esclat de vostre Dignité,
Le Temps mettroit vos faits dans une ombre si noire,
Qu’à peine sçauroit-on si vous auriez esté.

Eslevez des Palais, superbes en structure ;
Faites y travailler & l’Art & la Nature
Et par ces Bastiments estonnez l’Univers :

Princes, apres cela vous devez vous résoudre
A voir ce bruit esteint & ces Palais en poudre,
Et vostre Nom comme eux s’il n’est mis dans vos Vers.



Sur la mort du grand Cardinal de Richelieu.


Muses, retirez vous aux Sommets du Parnasse ;
Pleurez y vostre perte & n’en descendez plus ;
Quittez, rompez, brisez vos Lires & vos Luts,
Et de larmes de sang pleignez vostre disgrace ;

Arrachez vos cheveux ; déchirez vous la face ;
Esclatez dans vos Bois par mille cris aigus,
Et, d’une ame troublée & d’un esprit confus,
Imitez la fureur des Bacchantes de Thrace ;

Laisser (dis-je) flaistrir vos Lauriers les plus vers ;
Refusez mesme aux Dieux & vos chants & vos vers,
Et de torrents de pleurs troublez l’eau d’Hipochrene ;

Accusez la Nature ; injuriez le Sort ;
Que la Terre & le Ciel vous donnent de la haine ;
Car enfin (le diray-je ? hélas !) Armand… est mort.



la belle égiptienne.


Sombre divinité, de qui la splendeur noire
Brille de feux obscurs qui peuvent tout brusler :
La neige n’a plus rien qui te puisse égaller,
Et l’Ebene aujourd’hui l’emporte sur l’Ivoire.


De ton obscurité vient l’esclat de ta gloire,
Et je voy dans tes yeux, dont je n’ose parler,
Un Amour Affriquain, qui s’appreste à voller,
Et qui d’un Arc d’Ebène aspire à la victoire.