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le château de chavaniac

mari et quelques objets précieux, parmi lesquels l’épée d’honneur offerte à Lafayette par le petit-fils de Franklin, lors de son premier retour d’Amérique. Elle envoya, sous la conduite de M. Frestel, précepteur de son fils, ses trois enfants, dans un presbytère de la montagne, où ils trouvèrent un sûr asile.

Peu de jours après, un arrêté du directoire du district de Brioude ordonna l’apposition des scellés à Chavaniac. « Ma mère, nous dit Mme de Lasteyrie[1], avait elle-même provoqué cette mesure afin d’en imposer aux brigands dont on annonçait toujours le passage. Le mot émigré ne fut pas inséré au procès-verbal et le respect que lui montrèrent les deux commissaires, faisait espérer qu’elle n’aurait rien à craindre au moins du côté de l’Administration. »

Vers la même époque, un bataillon de volontaires de la Gironde qui rejoignait l’armée passa dans le village ; « ils étaient fort exaltés et parlaient de piller le château[2] ». Mais Mme de Lafayette donna à dîner aux officiers, fit nourrir les soldats logés chez l’habitant et, par sa fermeté, imposa la déférence.

Enfin, le 10 septembre, le château fut investi par un détachement armé, composé de gendarmes et de gardes nationaux du Puy. Le commissaire Alphonse Aulanier, qui le suivait, était porteur d’un arrêté du comité général ordonnant de conduire à Paris Mme de Lafayette et ses enfants. En conséquence, Mme de Lafayette, sa fille aînée et sa tante, durent aussitôt partir pour Le Puy. À peine arrivée dans cette ville, la femme de l’ancien commandant en chef des gardes nationales parisiennes fut introduite devant l’administration départementale, à qui elle imposa le plus grand respect par la fierté de ses réponses et la dignité de son maintien.

Les captives n’obtinrent toutefois leur liberté qu’à la fin de septembre, grâce à l’intervention de Rolland et de Brissot. Mme de Lafayette prenait l’engagement de retourner à Chavaniac

  1. Mme de Lasteyrie, loc. cit., p. 234.
  2. Mme de Lasteyrie, loc. cit., p. 230.