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ral, au niveau du roi et des plus grands feudataires. Comme chevalier, il avait des égaux et point de supérieurs. Riche, il gouvernait sa terre et guerroyait à son plaisir, soit dans ses domaines, soit en France ou en pays étranger. Pauvre, il cherchait du service, à la cour du roi, dans les maisons princières ou dans les palais épiscopaux, mais c’était son épée seule qu’il aliénait au profit d’autrui ; son titre de chevalier demeurait intact, au dessus des exigences de la vie matérielle. Au Puy, l’évêque comptait maints chevaliers dans son ost, dans ses expéditions ; en temps de paix, il avait aussi à sa solde des gentilshommes de cet ordre et il utilisait leur expérience militaire pour la conservation de sa mense et la garde de ses châteaux. Dans cette enquête de 1285, que nous nous plaisons à citer, on voit Bernard de Montaigu partir en guerre avec plusieurs chevaliers, ses commensaux, et, après la prise du manoir de Chapteuil, instituer pour châtelain ou capitaine de la place conquise, un chevalier d’Auvergne, nommé Drogon d’Aubusson.

Les deux qualifications de scutifer et de domicellus répondaient l’une et l’autre à l’idée de stage, de noviciat d’un gentilhomme, aspirant à la chevalerie, mais trop jeune pour ceindre le baudrier. L’appellation latine : dominus, maître, seigneur, était réservée d’abord à Dieu, le souverain par excellence. Le domnus fut un premier diminutif de dominus et servit à désigner les puissances de la terre, les papes et les rois, les princes et généralement toutes les personnes constituées en dignité. Le domicellus fut à son tour le diminutif de domnus : il semble qu’aux débuts de la féodalité le domicellus était plus spécialement un jeune homme issu d’une famille non seulement aristocratique, mais encore maîtresse de la terre et du fief. L’adolescent, qualifié de scutifer à cause de sa fonction et de domicellus à raison de sa haute naissance, était, en outre, salué dans les relations familières d’un petit surnom amical : Guigonetus… Poncetus… Guigonnet ou petit Guigues… petit Pons… À l’âge viril, il devenait Guigues ou Pons tout court. À la longue, ces expressions de dominus, domnus et domicellus perdirent