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CONTES ET LÉGENDES DE LA HAUTE-LOIRE



Un article paru dans le tome IV des Tablettes historiques du Velay[1] a mis les lecteurs de cette Revue au courant des exploits du lutin ou Draye, aux environs de Saugues. De nouveaux renseignements, puisés à bonne source[2], m’ont appris que le lutin était un mathématicien de premier ordre. En voici la preuve :

Il a la manie de s’introduire nuitamment dans les maisons et là, il dérange, bouleverse, brise et déchire ce qui lui tombe sous la main ou la griffe, car nul n’a pu me renseigner encore sur ce détail particulier. S’il parvient à la cachette où s’enfouissent les économies de la famille il compte scrupuleusement ce qu’elle renferme, or, argent, billon. Tout est par lui régulièrement dénombré. Pour se débarrasser d’un visiteur aussi importun, on dépose sur la table une poignée de cendres. Le Draye, dans sa passion pour les comptes et le calcul, vient s’asseoir auprès, et compte l’une après l’autre les molécules qui composent le tas de cendres. Jugez s’il lui faut du temps et de la patience. Bref, les étoiles pâlissent, l’aube apparaît, et il n’a pas fini de compter… Emporté par la colère et la fureur, il éparpille les cendres dans la maison et s’enfuit pour ne plus revenir.

  1. Contes et légendes de la Haute-Loire, page 499.
  2. Je dois communication de ces légendes à l’obligeance de M. l’abbé François Fabre, de Saugues.