noble que n’ont pas les paysans de France. Et nous lui demandasmes :
— Que faistes-vous ici, ma brave femme ?
— Je finis ma neuvaine, mes bons messieurs.
— Votre neuvaine ! que nous lui dismes, assez ébahis.
— Mais oui, qu’elle répondit, ma neuvaine pour demander au Bon Dieu que voilà qu’il accorde la vie sauve à mon Michel, mon seul fils, parti à Québec dans l’armée de M. de Montcalm.
Puis, tout aussitôt, elle ajouta :
— Vous pouvez croire que je n’ay pas oublié, non plus, mon pauvre païs. Tandis que j’y étais, j’ay aussi demandé au Bon Dieu de sauver la Nouvelle-France de périssance et la garder toujours en demeurance.
— Tout ça est fort bien, lui répliquai-je, mais votre place n’est plus ici et il va falloir vous en aller.
Et je montray le canot chargé d’Anglais, qui déjà était à mi-chemin et allait bientôt atterrer. Mais elle, sans s’effrayer, de répondre :
— Vous n’y pensez pas. Il faut que je reste pour finir ma neuvaine, et voir s’ouvrir les yeux de Notre-Seigneur.