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quelque foible qu’elle soit, a procuré cette foule de jouissances, est inaccessible au calcul. Observez, par exemple, l'étoffe de laine qui habille le journalier-laboureur : elle est rude & grossière, sans doute ; & cependant n’est-elle pas le produit du travail réuni d’une multitude prodigieuse de mains ? Il a fallu pour le vêtir, même de ce grossier habit, que, se succédant l’un à l’autre, berger, marchand, cardeur, fileur, tisserand, fouleur, teinturier, tailleur, & beaucoup d’autres encore se soient mis tous en mouvement. Que de marchands & de colporteurs employés à faire passer les matériaux nécessaires à quelques uns de ces ouvriers, dans les mains de plusieurs autres, qui vivent souvent aux deux extrémités d’une même contrée ! Quel assemblage, & de commerces, & de navigations, & de navires de transport, & de matelots, & de cordiers, & de faiseurs de voiles, pour apporter les corps des trois règnes de la nature animal, végétal & minéral, dont le teinturier fait usage, & qui lui arrivent des parties du monde les plus reculées ! Quelle variété de travaux indispensables pour la fabrication des outils du plus médiocre de ces ouvriers ! Ne parlons pas des machines