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neuves, sortant du balancier, n’auraient pas acheté au marché plus de marchandises que les autres guinées courantes ordinaires, parce que ces guinées neuves, une fois entrées dans la caisse du marchand et confondues avec d’autres pièces de monnaie, ne pouvaient plus désormais en être distinguées, sans qu’il en coûtât pour cela plus de peine que la différence n’aurait valu. Tout comme d’autres guinées, elles ne valaient pas plus de 46 livres 14 schellings 6 deniers la livre pesant : néanmoins, jetées dans le creuset, elles produisaient, sans aucun déchet sensible, une livre pesant d’or au titre, qu’on pouvait vendre en tout temps pour une somme d’environ 47 livres 14 schellings, ou 48 livres en or ou en argent, somme tout aussi bonne pour remplir toutes les fonctions de monnaie que la somme qu’on avait fondue. Il y avait donc un profit évident à fondre la monnaie nouvellement frappée, et cela se faisait si promptement, qu’il n’y avait pas de précautions du gouvernement capables de l’empêcher. Les opérations de l’hôtel des Monnaies étaient à cet égard à peu près comme la toile de Pénélope ; l’ouvrage fait dans le jour était défait pendant la nuit. L’hôtel des Monnaies était occupé bien moins à faire des additions journalières à la quantité des espèces courantes, qu’à en remplacer sans cesse la partie la meilleure qui était fondue journellement.

Si les particuliers qui portent leur or et leur argent à la Monnaie étaient tenus d’en payer le monnayage, alors il ajouterait à la valeur de ces métaux, tout comme la façon ajoute à celle des ouvrages d’orfèvrerie. L’or et l’argent monnayés auraient plus de valeur que non monnayés. Un droit de seigneuriage qui ne serait pas exorbitant ajouterait au métal toute la valeur du droit, parce que le gouvernement ayant partout le privilège exclusif de battre monnaie, aucune monnaie ne pourrait se présenter dans le commerce à meilleur marché que le gouvernement ne jugerait à propos de la fournir. À la vérité, si le droit était exorbitant, c’est-à-dire s’il était fort au-dessus de la valeur réelle du travail et des dépenses nécessaires du monnayage, alors les faux-monnayeurs, tant au-dedans qu’au-dehors du pays, se trouveraient encouragés, par la grande différence de prix entre le lingot et le métal monnayé, à verser dans le pays une assez grande quantité de monnaie contrefaite, pour pouvoir rabaisser la valeur de la monnaie du gouvernement. Cependant, quoiqu’en France le droit de seigneuriage soit de 8 pour 100, on n’a jamais vu qu’il en fût résulté d’inconvénient sensible de ce genre. Les dangers auxquels est partout exposé un faux-monnayeur s’il de-