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plus grande quantité de ce travail. Le salaire de ce travail hausserait naturellement en raison de la multiplication des demandes, et malgré cela il pourrait en apparence sembler avoir baissé. Il se pourrait qu’on le payât avec une moindre quantité d’argent, mais cette moindre quantité achèterait plus de marchandises que la plus grande quantité n’eût pu en acheter auparavant. Les profits des capitaux baisseraient aussi bien en réalité qu’en apparence. La masse générale des capitaux du pays étant augmentée, la concurrence entre les différents capitaux qui la composent augmenterait naturellement avec elle. Les possesseurs de ces capitaux particuliers seraient bien obligés de se contenter d’une plus petite portion dans le produit du travail que mettraient en activité leurs capitaux respectifs. Par ce moyen, l’intérêt de l’argent, qui suit toujours le cours du profit des capitaux, pourrait se trouver extrêmement réduit, encore que la valeur de l’argent, c’est-à-dire la quantité de choses qu’une somme donnée d’argent pourrait acheter, fût très-augmentée.

Dans certains pays, la loi a prohibé l’intérêt de l’argent ; mais comme partout l’usage de l’argent est bon à quelque chose, partout on payera quelque chose pour se le procurer. L’expérience a fait voir que de telles lois, au lieu de prévenir le mal de l’usure, ne faisaient que l’accroître ; le débiteur étant alors obligé de payer, non-seulement pour l’usage de l’argent, mais encore pour le risque que court le créancier en acceptant une indemnité qui est le prix de l’usage de son argent. Le débiteur se trouve obligé, pour ainsi dire, d’assurer son créancier contre les peines de l’usure.

Dans les pays où l’intérêt est permis, la loi en général, pour empêcher les exactions de l’usure, fixe le taux le plus élevé qu’on puisse exiger, sans encourir de peine. Ce taux devrait être toujours un peu au-dessus du taux le plus bas de la place ou du prix qui se paye couramment pour l’usage de l’argent, par ceux qui peuvent donner les plus grandes sûretés. Si l’on fixait ce taux légal au-dessous du taux le plus bas de la place, les effets de cette fixation seraient à peu près les mêmes que ceux d’une prohibition absolue de l’intérêt. Le créancier ne voudrait pas prêter pour moins que ne vaut l’usage de son argent, et le débiteur serait obligé de l’indemniser du risque qu’il courrait en acceptant le prix de cet usage dans toute sa valeur. S’il est fixé précisément au taux le plus bas de la place, alors tous ceux qui ne sont pas en état d’offrir les meilleures de toutes les sûretés ne peuvent plus